Fanfare Mentale d'Eva Droux


 

J'ai reçu « Fanfare mentale » d'Eva Droux, dans le cadre d'un SP et je suis ravie de la qualité du livre papier, sobre et clair, dans un format assez grand et fin, maniable et confortable à la lecture.

Ma lecture, bien que se présentant comme prometteuse après avoir achevé le prologue, m'a laissée sur ma faim et sur un avis général mitigé (les aspects qui m'intéressaient n'ont pas été développés et le tout manquait, à mon humble avis, de profondeur. Mais, si la rencontre ne s'est pas faite pour moi, ce récit pourrait correspondre à vos attentes, car il ne manque pas de qualités. Je vous écrit donc ici, un retour qui se veut le plus objectif possible, afin que vous puissiez découvrir « Fanfare mentale » et vous faire votre propre idée.


Le prologue m'a happée dans ce livre qui aborde un sujet délicat : les troubles de la santé mentale. Ici, l'autrice et narratrice se livre sur ses idées obsessionnelles, liées à une dévalorisation d'elle même. Elle nous explique les voix dans sa tête qui lui parlent, se parlent dans une confrontation continue, d'où le titre explicite « Fanfare Mentale » qui symbolise ce vacarme intérieur. Cette intériorité débordante prend même le pas sur son environnement extérieur, accapare son attention au détriment de sa vie et devient vite gênante pour se concentrer . Ses pensées envahissantes ne lui laissent pas de répit et deviennent une immense fatigue au quotidien.

Les explications simples et bien amenées permettent une bonne appréhension du problème. La narratrice y évoque aussi la réflexion possible par l'écrit, le pouvoir des mots, leur influence sur soi et sur les autres.

L'autrice prévient qu'elle offre un partage d'un moment de sa vie (faits ponctuels), sans tabou, écrit avec franchise. Elle l'écrit pour elle même comme une thérapie, mais aussi pour les autres pour sensibiliser et pour démystifier le trouble mental.


Dans ce récit, la narratrice écrit son expérience en Jamaïque, où elle s'installe pour quelques mois en tant que psy bénévole pour personnes sans abris. Elle quitte une situation familiale compliquée et quitte son petit copain peu avant le départ.

Sa famille se montre plutôt exigeante, envahissante, même pendant son séjour, voire culpabilisante. Quand à son petit ami dépressif, il doit, selon elle, se reprendre en main en se soignant. Leur relation reste ambiguë dans le récit et la narratrice elle même, ne sait pas bien où elle en est.

Ce voyage en Jamaique, bénéfique d'un point de vue professionnel, permet une rupture avec sa vie d'avant. Il ressemble presque à une fuite, mais surtout à un moyen de se retrouver, de pouvoir penser à elle même et laisser de côté la culpabilité.


Le récit prend la forme de journal intime, un carnet de voyage, daté, plus ou moins régulier avec des passages plus ou moins courts. Il existe une continuité chronologique linéaire, si ce n'est le tout premier écrit qui évoque un retour déprimant.

Le voyage apparaît ainsi comme une bulle hors du temps, une parenthèse avant le retour à la grisaille.

Dans ce journal qui fait office de journal de bord, la narratrice livre son quotidien, sa routine. (importance de celle ci), les événements du jour, les sorties, les rencontres, les amis, les amours, les moments heureux, de plénitude et d'euphorie, mais aussi les doutes et les trahisons...

La routine évoquée semble si importante qu'elle ne veut pas la voir perturbée par quiconque (on y retrouve quotidiennement yoga, course à pied, mais aussi l’écriture, même si ces aspects ne sont pas développés). La routine permet le contrôle, un cadre rigide et l'écriture est salvatrice. Elle répond à un stress constant qui l'incite à prendre le contrôle, à être toujours en contrôle des événements et de sa vie, sinon l'angoisse monte.

L'arrivée en Jamaïque permet à la narratrice une prise de ses marques et une confiance en elle qui se développe positivement grâce à des relations positives avec des amis complices et une relation amoureuse  : moins d'angoisse lui permet donc une ouverture sur l'extérieure et aux autres.


Le séjour en Jamaïque permet de voyager dans des lieux pas forcément touristiques, donc plus intimes et plus vrais. Les descriptions sont sympathiques, mais manquent d'émotions, de sensations, comme si elles étaient bridées par la fanfare mentale.

On découvre donc la Jamaïque dans une beauté simple, colorée, chaleureuse avec des paysages luxuriants, cadre idyllique, propice au bien être. L' atmosphère apparaît également euphorisante, avec le soleil, la musique et les plaisirs de la vie, qui semblent plus faciles,et à portée de main, avec l'évolution de la narratrice et du récit.


Les textes proposés au fil des jours sont bruts, fluides, linéaires, suivant les pensées de la narratrice. La plume agréable, simple offre un récit bien écrit qui incorpore parfois des expressions du langage oral. Ceci ne m'a pas dérangé dans ce récit intime et il s'insèrent naturellement (avec une candeur et une honnêteté bienvenues). Le récit reste très personnel, mais jamais gênant, se lit comme une fiction. C'est un témoignage direct, mais peu développé.J'avoue que je m'attendais à plus de profondeur et à une analyse plus poussée du processus mental, avec une prise de recul sur les événements sur l'implication du trouble mental dans la vie de la narratrice.

J'aurais aussi eu envie d'en savoir tellement plus sur son projet professionnel et sur la relation avec les patients.


Bref, j'avais des attentes, pas forcément illégitimes et le récit a pris un tour différent de ce que j'imaginais, tout à fait légitime. Celui ci ne manque pas de qualité. Mais voilà, je suis passée à côté et nous n'avons pas réussi à nous rejoindre. Cela arrive parfois...


Je remercie Eva Droux pour sa confiance et espère retrouver sa plume dans un récit qui me correspondra mieux.

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